Béatrice Dalle a 14 ans lorsqu'elle quitte Le Mans, ville où elle a grandi, pour rejoindre la capitale. Un mannequin rencontré sur les Champs-Elysées lui propose bientôt de poser pour le magazine Photo, dans le cadre d'une série sur les lolitas. En une de la revue, le cliché est remarqué par l'agent Dominique Besnehard, qui recherche une jeune inconnue pour donner la réplique à Jean-Hugues Anglade dans 37°2 le matin de Jean-Jacques Beineix. Stupéfiante de naturel dans le rôle de l'impulsive et fragile Betty, la comédienne aux lèvres pulpeuses est promue, grâce au succès international du film, nouveau sex-symbol du cinéma français.
Après ces débuts fracassants, Béatrice Dalle se voit proposer des films qui exploitent avant tout sa plastique (La Sorcière de Bellocchio, Les Bois Noirs), mais des metteurs en scène exigeants révèleront peu à peu une comédienne inventive au jeu intense. Partenaire en 1990 d'Isabelle Huppert dans La Vengeance d'une femme, âpre huis clos de Doillon - le cinéaste auprès de qui elle dira avoir le plus progressé -, elle est également choisie par la fine fleur du cinéma indépendant américain, de Jarmusch (elle campe une aveugle clairvoyante dans Night on Earth) à Ferrara (The Blackout). L'actrice à la présence animale devient une figure familière de l'univers nocturne et sensuel de Claire Denis, avec des films comme J'ai pas sommeil ou Trouble every day, récit d'une passion dévorante qui secoue la Croisette en 2001.
S'autorisant quelques incursions dans des oeuvres grand public (La Belle histoire de Lelouch en 1992, La Fille de l'air, d'après l'histoire vraie de Nadine Vaujour), l'insoumise Béatrice Dalle, devenue une égérie du cinéma d'auteur (17 fois Cécile Cassard en 2002) déclare en 2004 à Libération : "Je ne lis jamais les scénarios, je ne connais pas le casting d'un film avant de le choisir : la seule chose qui compte, c'est le metteur en scène qui me demande de le rejoindre. Je veux des fortes personnalités, c'est mon seul critère de choix." C'est ainsi qu'elle part au Japon tourner dans une audacieuse relecture de Hiroshima mon amour (le quasi-expérimental H Story de Nobuhiro Suwa), et joue volontiers des rôles secondaires, pourvu que ceux-ci lui soient confiés par des artistes de la trempe de Haneke (Le Temps du loup) ou Assayas (Clean, en 2004). Elle semble aussi affectionner le cinéma de genre puisqu'on la retrouve en 2007 en compagne du Truands Philippe Caubère dans le polar de Frédéric Schoendoerffer et en héroïne d'un film d'horreur (A l'intérieur). Par la suite, on la voit à l'affiche de comédies dramatiques telles que Tête d'or (2007) de Gilles Blanchard, Les Bureaux de Dieu de Claire Simon en 2008 et Domaine de Patric Chiha en 2010, film dans lequel elle interprète une mathématicienne dépressive.
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