Catherine Deneuve, de son vrai nom Catherine Dorléac, est née le 22 octobre 1943. Son père, Maurice Dorléac, s'était déjà fait un nom au théâtre et sa mère, née Deneuve, était également comédienne. Sa sœur, Françoise Dorléac, décédée tragiquement en 1967, était son aînée de dix-huit mois. la jeune Catherine débute à l'écran à l'âge de 13 ans, lancée par Roger Vadim, pygmalion des stars féminines. Mais c'est grâce à Jacques Demy que Catherine Deneuve, jolie blonde dans la lignée des Dany Saval et Mireille Darc de l'époque, connaît la renommée. La Palme d'or à Cannes pour Les parapluies de Cherbourg n'y est évidemment pas pour rien, tout comme le succès rencontré par la film dans le monde entier. L'image de la jolie jeune fille, blonde et lisse, telle qu'elle apparaît dans Les parapluies..., n'a pas fini de hanter la comédienne, malgré un désir de sa part, dès le début, de jouer en des eaux plus troubles : l'exemple le plus frappant étant évidemment sa composition de schizophrène frigide dans le londonien Répulsion, signé Roman Polanski. Plus tard, Luis Buñuel continuera à explorer les sombres dessous de la beauté féminine, telle qu'elle en est l'archétype. Dans Belle de jour, il en fait une jeune femme de bonne famille aux fantasmes inavouables, qui s'adonne à la prostitution par pur désir. Tristana la plonge bientôt dans l'Espagne aristocratique où, jeune pupille, elle se livre sans détour à son tuteur puis se retrouve amputée d'une jambe. Ces années seront, cinémtographiquement parlant, les plus belles de la comédienne, qui suscite le désir des plus grands cinéastes, et provoque les rencontres les plus magiques, dont bientôt Jacques Demy à nouveau, qui lui confie le rôle-titre de Peau d'âne. Inaccessible, diaphane, majestueuse, elle incarne alors l'éternel féminin dans toute sa splendeur. Les années 70, outre un film sombre et difficile de Marco Ferreri (Liza), seront marquées par une accession vers une cinéma plus populaire. La maturité la voit ainsi se recycler dans un registre de fantaisie, où Deneuve sait exceller (Touche pas à la femme blanche, Zig-Zig, Courage, fuyons ! et surtout, Le sauvage). Convoitée par l'étranger mais peu encline à tourner plus loin que l'Europe, elle passe pourtant 1977 à l'étranger, en Italie et en Grande-Bretagne : dans Ames perdues, de Dino Risi, elle est l'épouse d'un Vittorio Gassman en proie à la folie ; dans Il était une fois la Légion, de Dick Richards, elle se retrouve dans la peau de la maîtresse de Gene Hackman et dans Casotto, de Sergio Citti, elle ne fait qu'une brève apparition, dans le rêve d'un des protagoniste de ce film inédit en France. Détective privée dans Ecoute voir, pharmacienne amoureuse d'un truand - Jacques Dutronc - dans A nous deux, elle triomphe en 1980 grâce à son interprétation de Marion Steiner dans Le dernier métro, de François Truffaut, qui lui vaudra le César de la Meilleure actrice. La même année, elle inspire à Claude Berri le personnage d'Alice, femme libre en quête d'un amour durable, l'héroïne de Je vous aime. Deux films qui marqueront les années 80 de l'empreinte d'une autre Deneuve : femme glacée, sophistiquée et définitivement inaccessible. Son rôle de vampire lesbienne dans Les prédateurs envenime cette perception, et la comédienne aura toutes les peines du monde à se débarrasser de cette étiquette très collante. En 1988, elle apparaît enfin, terriblement humaine et vulnérable, dans Drôle d'endroit pour une rencontre, de François Dupeyron, qui ne rencontre hélas pas le succès espéré. Entre-temps, la rencontre avec André Téchiné, qui lui offrit, avec Hôtel des Amériques, une très romantique histoire d'amour avec Patrick Dewaere, porte ses fruits, et Deneuve endosse bientôt pour ce dernier des personnages complexes, ambigus, à l'image d'Emilie dans Ma saison préférée. Seul contre-emploi manifeste avec Jean-Pierre Mocky, qui modifie totalement son apparence pour Agent trouble : lunettes et perruque rousse bouclée, elle incarne une vieille fille, mêlée malgré elle à une histoire policière. Prise comme modèle du nouveau buste officiel de Marianne, symbole de la République figurant depuis 1986 dans le Petit Larousse, symbole de la notoriété, hôtesse des plus prestigieuses manifestations cinématographiques, Catherine Deneuve devient la grande dame incontestée du cinéma français, consacrée par un nouveau César pour Indochine en 1992. Depuis quelques années, la comédienne s'ingénie encore et toujours à brouiller les pistes en tournant plus et avec des metteurs en scène très différents : marquise poudrée dans La partie d'échecs, d'Yves Anchar, bourgeoise alcoolique dans Place Vendôme, de Nicole Garcia, elle tourne bientôt coup sur coup avec Leos Carax (Pola X, qui sera présenté au prochain Festival de Cannes), Gabriel Aghion (Belle maman) et l'austère Philippe Garrel (Le vent de la nuit, également à l'affiche ce mois-ci). Joli triplé ! L'année 1999 la verra dans le nouveau film de Raoul Ruiz, Le temps retrouvé, d'après Proust, puis dans la saga franco-slave Est-Ouest de Régis Wargnier, en actrice qui vient au secours de Sandrine Bonnaire. Souvent associée à des projets excitants et ambitieux, on la retrouve dans la Palme d'or de Cannes 2000, Dancer in the dark, où elle est la collègue d'usine de l'héroïne incarnée par Björk. Un rôle évidemmement à contre-emploi, qui lui demande également de pousser la chansonnette et de danser. Les films continuent à se suivre sans se ressembler, entre la grosse production américaine (D'Artagnan) et le film d'auteur français de prestige (Le petit Poucet), deux films dans lesquels elle tient le rôle de la reine. Nouveau coup d'éclat début 2002 alors qu'elle incarne l'une des 8 femmes du film de François Ozon, matriarche replète soupçonnée d'avoir tué son mari. Un rôle en or qui exige humour et second degré, ce sont l'actrice fait une nouvelle fois preuve. Si elle apparaît très brièvement dans Je rentre à la maison et dans Absolument fabuleux, si elle donne uniquement de la voix dans Nuages, un documentaire (vu à Cannes) réalisé par la Belge Marion Hänsel, revoici aujourd'hui Catherine Deneuve radieuse comme jamais dans Au plus près du paradis, tricoté sur mesure par une Tonie Marshall qui voit en elle l'héritière des grandes héroïnes romantiques des années 50. Un film où la légende côtoie le quotidien avec le personnage de Fanette, qui pleure sur un amour perdu sans s'apercevoir qu'elle a sous la main la chance de revivre une nouvelle histoire...
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