C'est à Paris, le 22 mai 1924, que naît le petit Shahnour Varenagh Aznavourian, après que ses parents, arméniens, ont fui la Turquie avant le grand massacre de 1915. Le bambin ne mettra pas longtemps avant de comprendre où va se dérouler sa vie : sur les planches. Il y entame ainsi sa carrière à 9 ans en tant que danseur, avant de se faire remarquer, quelques années plus tard, par Edith Piaf, qui a remarqué la chaleur de sa voix et la profondeur de son timbre unique. Petit par la taille, Aznavour est pourtant immense par le talent, et devient rapidement une vedette internationale de la chanson, avec des titres aussi célèbres que "La bohême", "Comme ils disent", "Je m'voyais déjà", "Tu t'laisses aller" ou encore "La mama"... Auteur, compositeur, interprète ou comédien, sa carrière s'étale aujourd'hui sur plus de soixante années et a fait de lui une véritable légende. Réinventeur de la chanson française (science du rythme et de la mélodie, variété des registres et modernité des sujets), collaborateur des plus grands, vedette de music-hall à la popularité jamais démentie, admiré par les plus grands “entertainers” anglo-saxons, il a écrit à ce jour plus de six cents chansons, vendu plus de cent millions de disques et participé à une soixantaine de films. Cette double carrière sur scène et à l'écran, et si l'on excepte quelques apparitions alors qu'il est encore adolescent, Aznavour l'entame en 1956, après avoir déjà connu la célébrité derrière son micro, en tenant la vedette d'Une gosse sensass. Son personnage d'aliéné dans La tête contre les murs de Franju lui vaut, trois ans plus tard, le Prix d'interprétation du cinéma français en 1959, mais son meilleur rôle reste celui que lui offre François Truffaut (un pianiste de bar qui voit sa vie bouleversée par deux truands) dans Tirez sur le pianiste. Enfin, André Cayatte le propulse au firmament des stars dans Le passage du Rhin. En l'espace de trois ans, Charles Aznavour aura tenu ses meilleurs rôles au cinéma, et par la suite, malgré une filmographie assez inégale dans l'ensemble (on le voit beaucoup, au début des années 70, dans des coproductions internationales comme Le tambour, où il ne tient qu'un rôle secondaire de commerçant), il sait ne jamais passer inaperçu, en dépit parfois de la minceur de ses rôles, souvent résumés à des participations. On l'a revu, voici quelques années, dans Pondichéry, dernier comptoir des Indes, en vieux sage au passé chargé d'aventures et de rencontres, et il apparaissait le temps d'une séquence volée dans Le messie de William Klein. Après plusieurs téléfilms ("Laura", "Les mômes", "Judicaël", "Angelina"), Charles Aznavour retrouve aujourd'hui le chemin des studios avec Ararat, d'Atom Egoyan, dans lequel il incarne le grand Edward Saroyan, réalisateur d'origine arménienne qui tourne un film retraçant les prémisses du géniocide de 1915.
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