Claude Chabrol est né à Paris le 24 juin 1930. Il poursuit des études dites “normales” (une licence de lettres et des études de pharmacie) à Paris, mais renonce bientôt à toutes ces foutaises pour s'adonner à sa passion : le cinéma. Rat de Cinémathèque, passionné par le cinéma américain plus particulièrement, il devient bientôt critique, notamment aux "Cahiers du Cinéma", une revue qui renouvelle alors totalement la façon de parler du 7e Art, avec un angle définitivement critique et tendu vers la notion d'auteur. Un temps attaché de presse pour la Fox, Claude Chabrol publie, en 1957, en collaboration avec Eric Rohmer, autre pilier des "Cahiers du Cinéma", un livre sur Hitchcock. Et puis c'est le jackpot : la même année, la grand-mère de sa femme lui lègue la coquette somme de trente-deux millions de francs ! Chabrol fonde illico sa société de production, et produit, pour démarrer, un court métrage de Jacques Rivette, Le coup du berger, dont il est aussi scénariste. Le beau Serge, un drame campagnard qui dénote avec ses futurs thèmes de prédilection, sera son coup d'essai en tant que réalisateur, d'emblée couronné par un succès commercial conséquent. Il reprendra ses comédiens principaux, Gérard Blain et Jean-Claude Brialy, pour Les cousins, crépusculaire études de mœurs dans un Paris partagé entre existentialisme et misère. Après une série de films ambitieux qui s'avèrent commercialement peu rentables (Les bonnes femmes, Les godelureaux, Ophélia – d'après Shakespeare – ou encore le drame adultérin L'œil du malin), il finit par tourner des films alimentaires afin de se remettre en selle (et de payer ses impôts, selon ses propres aveux !) : la série des “Tigre”.
En 1968, Chabrol renoue enfin avec le succès, à la fois critique et public, en alignant une série de films prestigieux, raffinés et pervers : Les biches, La femme infidèle, Le boucher, Que la bête meure, autant de portraits grinçants d'une certaine bourgeoisie provinciale où sa femme Stéphane Audran se taille généralement la part du lion. Chabrol va ainsi être, pendant de nombreuses années, l'un des cinéastes français des plus productifs. En 1976, il travaille sur la série télé "Madame le juge", avec Simone Signoret, et Violette Nozière lui donne l'occasion de renouer avec le succès cinématographique, en 1978, après cinq années et une demi-douzaine de films que son auteur qualifie lui-même d'alimentaires. C'est donc évidemment un risque qu'il prend, en 1980, en se lançant dans l'adaptation du Cheval d'orgueil, le roman breton de Pierre Jakez-Elias, avec des comédiens peu connus du grand public. Les années 80 seront pourtant des années “grasses”, car le cinéaste s'adonne alors à son genre de prédilection, les polars torves à connotation sociale : Les fantômes du chapelier, Poulet au vinaigre, Inspecteur Lavardin (ces deux derniers avec Jean Poiret en vedette), Masques, sur l'affairisme de certaines stars de la télévision, Le cri du hibou... Avec Une affaire de femmes, en 1988, il met encore et toujours la bourgeoisie sur la sellette.
Les années 90 restent dans le droit fil de son thème de prédilection, outre plusieurs divertimento (les adaptation de Jours tranquilles à Clichy et de Madame Bovary, avec Isabelle Huppert, qui va alors devenir son actrice fétiche.) Les succès s'accumulent, et le registre glisse vers un terrain nettement plus psychologique et intimiste (Betty, L'enfer). En 1995, La cérémonie lui permet de récolter un de ses plus grands succès commerciaux, mettant en vedette Isabelle Huppert et Sandrine Bonnaire dans un drame bourgeois des plus pervers. Retour d'Isabelle Huppert pour la ballade Rien ne va plus (son cinquantième film) et de Sandrine Bonnaire dans Au cœur du mensonge, puis re-Isabelle Huppert, star introvertie de Merci pour le chocolat. C'est ensuite Nathalie Baye qui poursuit cette suite logique, en incarnant, dans La fleur du mal, une bourgeoise dynamique se prêtant au jeu des élections municipales alors que sa famille recèle de bien lourds secrets. L'année suivante, c'est avec La demoiselle d'honneur que revient Claude Chabrol, pour l'histoire d'un cadre sans histoire (Benoît Magimel) qui tombe amoureux de la jeune et mystérieuse Senta (Laura Smet), alors qu'en ce début d'année 2006, c'est Isabelle Huppert qui tient le premier rôle de L'ivresse du pouvoir, fable à peine voilée sur ce qu'on a appelé “l'affaire Elf”, où l'actrice incarne une juge d'instruction qui se heurte aux luttes d'influence qui gouvernent en sous-main le monde complexe des affaires…
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