Né Giovanni Moretti le 19 août 1953 à Brunico, en Italie, Nanni Moretti se dévoue depuis l'enfance à deux passions : le cinéma et le water-polo (deux passions qu'il conciliera d'ailleurs en 1990 pour son film Palombella rossa, qui se déroule pour la majeure partie dans une piscine). Bien qu'à l'orée des années 70 il joue dans l'équipe nationale italienne de water-polo, professionnellement, c'est le cinéma qui l'emporte. Une fois ses études terminées, il se sépare de sa collection de timbres afin de s'acheter une caméra Super-8 avec laquelle il commence à réaliser des courts métrages à forte teneur politique (Moretti milite alors beaucoup dans l'extrême-gauche), avant un premier long de fiction, toujours en Super-8. Je suis un autarcique, dont le héros, Michele, joué par Moretti lui-même, sera son premier double cinématographique d'une veine autobiographique qui perdure encore aujourd'hui dans son œuvre. L'humour corrosif, politiquement impliqué, permet à ce film de se faire fortement remarquer parmi les milieux intellectuels. Ecce bombo, un an plus tard, marque la première vraie incursion de Nanni Moretti dans le cinéma dit “professionnel” (avec d'ailleurs une sélection officielle à Cannes), relatant la vie quotidienne d'un étudiant romain, ses aventures amoureuses et politiques.
Avec Sogni d'oro, dans lequel un metteur en scène (toujours joué par Moretti) parcourt les institutions scolaires et religieuses pour réaliser un film sur la jeunesse, Nanni Moretti devient un des plus sûrs espoirs d'une nouvelle génération de cinéastes italiens. Bianca, dans lequel un enseignant passe son temps libre à veiller à la bonne moralité de ses ami, trouve une veine plus intimiste et romantique (il y a une histoire d'amour à la clé), tandis que La messe est finie aborde la religion avec austérité et un refus d'hypocrisie moderne et intelligent. Finalement, c'est avec Palombella rossa que Nanni Moretti, cinéaste emblématique des années 80, rencontre un plus large public, en dépit de l'austérité apparente du film : la scène politique symbolisée par un match de water-polo. C'est pourtant une œuvre enjouée, ironique et brillante où l'auteur règle ses comptes avec la société italienne contemporaine, la politique, la religion, la morale et lui-même. C'est aussi la fin d'un cycle pour Moretti, qui, outre un documentaire sur des élections (La cosa) va, pendant trois ans, produire et tourner dans des films d'amis (Daniele Luchetti, Mimmo Calopresti, de la même génération de cinéastes politiquement engagés).
Finalement, le retour à la caméra se fera en 1993 avec Journal intime, triptyque filmé à la première personne qui prend pour sujet certaines des obsessions d'un auteur joyeusement et ouvertement égocentrique. Le film remporte le Prix de la Meilleure mise en scène à Cannes, et un triomphe commercial dans la foulée. Il faudra attendre près de cinq ans pour le film suivant, Aprile, courte chronique familiale où Moretti parle de ses crises d'inspiration et de la naissance de son fils. Un fils dont il projette la mort et ses angoisses de père face à telle fatalité dans La chambre du fils, dixième long-métrage du plus singulier qui décroche la très convoitée Palme d’or au Festival de Cannes.
Cinq ans plus tard, plus impliqué dans le combat politique que jamais, Nanni Moretti revient avec Le caïman, un drame oscillant entre crise conjugale et crise sociale qui s’annonce comme une petite bombe à l’encontre de Silvio Berlusconi puisque le film sort précisément deux semaines avant les élections législatives en Italie.
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